Quand une personne de notre entourage, un proche, un·e ami·e, un membre de notre famille rencontre des difficultés passagères ou plus durables, il peut être tentant de vouloir lui venir en aide. Cela d’autant plus si nous sommes convaincu de détenir « la solution » dont la personne à tant besoin. Parfois cette envie spontanée d’aider se retourne contre soi-même alors que l’élan premier est louable.
« Il faut l’aider ! » « Elle a besoin de s’en sortir» « On ne peut pas rien faire » « Il·elle est entrain de faire fausse route » …
En y regardant de plus près, tous ces messages ne sont en fait des ordres déguisés. Des « tu dois » , des « il faut » que nous avons peut-être déjà croisés sur notre route (durant notre enfance, à l’école, en famille ...)
Qui n’a jamais entendu pareille affirmation péremptoire ?
Comment vous êtes-vous alors senti ?
Avez-vous apprécié de recevoir ces ordres déguisés ?
Vous sentiez-vous alors encore libre de décider face à cette aide extérieur non sollicitée ?
En prenant un peu de recul sur la situation, il me vient les questions suivantes :
Qui a dit qu’il fallait absolument apporter notre aide ?
La personne en difficulté a t-elle formulée une demande claire de besoin d’aide ?
A t-on seulement pris le temps de vérifier si la personne a besoin d’être aidée et si notre aide correspond réellement à son besoin du moment ? Peut-être que nous ne sommes pas la bonne personne. Peut-être que le moment n’est pas opportun pour l'autre ...
Et si nous nous placions l’espace d’un instant dans la peau de la personne en difficulté ? Nous serions alors en mesure de percevoir la façon dont une aide extérieure imposée est vécue de la part du receveur. Vous seriez alors surpris de constater ce qu’une aide – en apparence bienveillante – véhicule comme messages inconscients :
« Je viens t’apporter mon aide car tu es incapable de te prendre en charge toi même. Je fais cela car JE sais mieux que toi ce dont tu as besoin. Tu n’es pas capable de décider, moi oui !»
Wouahhhh !!!
Voudriez-vous recevoir ce genre de messages de la part d’une personne qui prétend vouloir votre bien ?
N’est-ce pas une forme d’abus psychologique ; une façon habile de prendre le contrôle sur la personne ?
Ne serions-nous pas alors entrain de nous prendre pour un dieu tout puissant qui régit les faits et gestes des petites gens ?
Dans pareille situation il ne s’agit plus d’aide mais davantage d’une tentative de sauver une personne à son insu. Le fameux triangle « Victime - Bourreau - Sauveur » connu sous le nom de triangle infernal de Karpman du nom de son créateur décrit très bien ce jeu psychologique dans lequel une personne prend le rôle de sauveur.
La frontière entre sauver et aider une personne est subtile et importante car d’un côté on déresponsabilise la personne quand de l’autre on lui laisse sa responsabilité, son pouvoir et sa liberté de décision.
En enlevant la puissance et la responsabilité de la personne qu’on prétend aider, on la diminue au lieu de lui permettre de grandir au travers de l’expérience qu’elle est entrain de traverser. Quand nous pensons lui faire gagner du temps en lui évitant toute une suite «de problèmes » (selon nous), nous sommes surtout entrain de la priver de la richesse d’expériences formatrices sur lesquelles elle ne pourra pas s’appuyer dans le futur.
En se plaçant inconsciemment en position de sauveur, qui tentons nous d’aider au juste? Est-ce vraiment la victime que nous aidons? Et si c’était plutôt une tentative détournée de se donner une aide dont nous aurions eu besoin à une certaine époque ?
Aider c’est conserver l’imputabilité des actes de la personne. C’est lui laisser sa liberté de choix.
Alors, comment laisser la liberté à la personne de formuler son besoin d’aide ?
Christophe Ferrari
Révélateur de Talents